Un an après la signature de l’Accord du 3 avril 2024, censé tracer la voie d’une transition politique en Haïti, le Bureau de Suivi de l’Accord Montana (BSA) monte au créneau. Dans un communiqué cinglant publié à l’occasion de cet anniversaire, les signataires dénoncent une « trahison » orchestrée par les membres du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), accusés d’avoir renié leurs engagements et compromis l’avenir du pays.

En mars 2024, après trois ans de négociations entre divers acteurs de la société civile, des secteurs religieux, économiques et politiques, l’Accord du 3 avril était perçu comme un espoir pour sortir Haïti de la crise. Mais dès l’installation du CPT le 24 avril 2024, les membres de cette instance ont, selon le BSA, rapidement tourné le dos à ce consensus.

Avec la complicité du gouvernement démissionnaire d’Ariel Henry, le Conseil aurait écarté les principes de l’Accord au profit d’un décret signé le 10 avril 2024 par l’ancien Premier ministre, seul texte de référence mentionné dans leur cadre d’action. Un « coup d’État » contre l’Accord du 3 avril, dénoncent les membres du BSA, qui y voient une volonté d’accaparer le pouvoir au mépris des engagements pris.

L’Accord du 3 avril définissait une transition axée sur la réconciliation nationale, le rétablissement de la sécurité, la lutte contre la corruption et l’impunité, ainsi que la préparation d’élections démocratiques. Un an après, le BSA dresse un bilan accablant du CPT.

« Depuis leur installation, ils n’ont jamais montré la moindre volonté de répondre aux revendications de la population », accuse le communiqué. Le résultat serait un effondrement total de l’État haïtien, marqué par une montée en puissance des gangs armés, une insécurité galopante et une situation humanitaire désastreuse. Selon le BSA, plus de 6 000 personnes ont été massacrées, des milliers de femmes et de jeunes filles victimes de viols, plus d’un million de citoyens déplacés, et plusieurs quartiers entièrement dévastés.

En outre, les engagements de transparence et de lutte contre la corruption seraient restés lettre morte. « Il n’est pas étonnant que l’Organe de Contrôle prévu par l’Accord n’ait jamais vu le jour », souligne le document.

Face à ce constat, le BSA estime que la transition actuelle est un échec et appelle à un changement radical. « Il n’est plus question d’attendre le 7 février 2026 », préviennent les signataires, qui jugent que le CPT est incapable de restaurer la sécurité et de garantir des élections crédibles.

Pour eux, la seule issue est la démission immédiate du CPT et du gouvernement, afin de permettre la mise en place d’une nouvelle gouvernance de transition. Celle-ci devrait être fondée sur une large concertation entre les forces organisées du pays et la diaspora, avec pour objectif premier le « sauvetage national » et la restauration de la paix.

« Arrêtez de nous tuer, de nous violer, de nous chasser, de nous priver de carburant, de piller l’État ! » s’indignent les signataires du communiqué, appelant à une mobilisation citoyenne pour imposer un véritable changement.