La récente déclaration d’Yves Ducarmel François, Directeur Général de l’Autorité Aéroportuaire Nationale (AAN), sur la situation des aéroports internationaux en Haïti révèle une réalité accablante : le pays reste prisonnier des décisions unilatérales de la Federal Aviation Administration (FAA) américaine, tandis que les autorités haïtiennes multiplient les promesses sans résultats concrets. Malgré le déploiement de 150 soldats des Forces Armées d’Haïti (FAd’H) et des travaux de sécurisation autour de l’aéroport Toussaint Louverture de Port-au-Prince, les vols commerciaux internationaux ne reprendront pas tant que les États-Unis n’auront pas donné leur feu vert. Cette soumission à la FAA, couplée à l’incapacité chronique des dirigeants haïtiens à moderniser les infrastructures alternatives comme Cap-Haïtien et Les Cayes, illustre un système en faillite, où la gestion de crise est constamment réactive plutôt que proactive.

1. La FAA, un veto américain sur la souveraineté aérienne haïtienne

La décision de la FAA de suspendre les vols vers Port-au-Prince repose sur des critères de sécurité, mais elle soulève plusieurs questions : Pourquoi les autres compagnies aériennes (Air Canada, Sunrise Airways, Copa Airlines) suivent-elles automatiquement les restrictions américaines ? Cela révèle une dépendance économique et stratégique excessive envers les États-Unis.
– La FAA applique-t-elle les mêmes exigences à d’autres pays en crise (comme le Honduras ou le Venezuela) ? Ou Haïti est-elle soumise à un traitement différencié en raison de son instabilité politique ?
– Les mesures de sécurisation (déploiement militaire, démolitions) sont-elles vraiment efficaces, ou simplement cosmétiques pour rassurer Washington ?

Le fait que Cap-Haïtien soit l’unique alternative viable, alors que l’aéroport Hugo Chávez est déjà saturé, montre un manque criant de planification.

2. L’incompétence des dirigeants haïtiens et l’échec du MMSS

Alors que la Mission Multinationale de Sécurité Soutenue (MMSS) est déployée depuis des mois, pourquoi la sécurisation des aéroports n’a-t-elle pas été une priorité plus tôt ?
– Où sont les résultats concrets du MMSS?
Si 150 soldats haïtiens suffisaient, pourquoi n’ont-ils pas été déployés avant la suspension des vols ?
– Pourquoi l’aéroport des Cayes (Antoine Simon) n’est-il toujours pas certifié international après des années de travaux ?
La mise à niveau vers une catégorie 4F en 2027 semble un horizon lointain, alors que la crise actuelle exige des solutions immédiates.
– Qui supervise réellement ces projets ? Les retards et l’absence de transparence nourrissent les soupçons de corruption et de mauvaise gestion.

3. Cap-Haïtien et Les Cayes : Des solutions partielles, mais insuffisantes 

– Cap-Haïtien : L’aéroport Hugo Chávez est déjà débordé. Pourquoi aucun plan d’urgence n’a été mis en place pour augmenter sa capacité d’accueil ?
– Les Cayes : Le passage en catégorie 3B (avions de 80 places) est un progrès, mais pourquoi attendre 2027 pour une catégorie 4F ? Une étude de 8 mois supplémentaires semble une excuse pour retarder les travaux essentiels.

Une souveraineté aérienne en lambeaux

La crise aéroportuaire haïtienne est le symptôme d’un État défaillant, soumis aux diktats étrangers et incapable de prioriser ses infrastructures stratégiques. Au lieu de dépendre des validations américaines, les autorités haïtiennes devraient :
✅ Négocier directement avec d’autres partenaires techniques (UE, Canada, OACI) pour des audits indépendants.
✅ Accélérer les travaux aux Cayes et à Cap-Haïtien avec des financements transparents.
✅ Exiger des comptes du MMSS sur la sécurisation effective des aéroports.

Sans une réelle autonomie décisionnelle et une gouvernance compétente, Haïti restera un pays sous tutelle aérienne, où chaque décision dépendra du bon vouloir de Washington.