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Un cours sur la décentralisation et la gouvernance locale

L’une des raisons pour lesquelles les collectivités territoriales sont si pauvres est que le gouvernement central ne les accorde pas le soutien économique et politique suffisant pour leur permettre de résoudre leurs problèmes. Quand je parle de soutien politique et économique, je me réfère à un certain niveau d’indépendance politique et économique où les gouvernements locaux ont suffisamment de ressources pour offrir des services publics de base aux résidents qu’ils représentent.

Lorsque les communautés locales n’obtiennent pas ces incitations, elles manquent d’autorité et d’opportunités. Ainsi, les problèmes continuent de dégénérer et les faiblesses continuent de s’accumuler. Tant que les problèmes s’aggravent, les autorités locales deviennent de plus en plus dépendantes du gouvernement central.

Avant d’approfondir la question, définissons ce qu’est le concept de «COLLECTIVITÉ TERRITORIALE»:

LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES représentent la manière dont le territoire d’une nation est divisé en différents niveaux administratifs. Haïti est divisée en dix départements (chaque département a un délégué départemental qui n’a pas le pouvoir de collecter les impôts mais représente l’administration publique dans les collectivités pour s’assurer que les appareils de l’Etat fonctionnent correctement). Le département lui-même est divisé en arrondissements. (il a un siège social où les bureaux nationaux de l’État sont gonflés, tels que les prisons, les bureaux des impôts, les bureaux ministériels, etc.). L’arrondissement lui-même est divisé en communes (chaque commune a un cartel qui forme le siège du conseil communal dirigé avec le pouvoir de percevoir les impôts, car il est le chef de l’exécutif de la commune.) La commune elle-même est divisée en sections communales et en quartier gérés et administrés par un cartel de trois membres appelés Conseil d’Administration de la Section Communale (CASEC). Enfin les sections communales sont divisées en habitations qui sont elles-mêmes représentées par des membres d’Administration de la Section Communale (ASECs) dont les nombres dépendent du nombre de personnes vivant dans les sections communales. Le nombre d’ASECs varie entre 7 et 11. Similaires avec les CASECs, les centres-villes des communes sont représentés par des cartels de délégués de ville dont le nombre des agents, tout comme les ASECs dépend de la démographie de la population. Les élus locaux, à l’exception des membres du conseil communal, organisent entre eux des élections indirectes pour former les assemblées municipales, départementales et interdépartementales.

Dans les détails donnés ci-dessus, on ne considère que les autorités exécutives qui représentent les collectivités territoriales, mais il y a aussi des représentants législatifs tels que trois sénateurs par département et un député par commune.

Il est important de reconnaître que la division territoriale n’est pas un arrangement cimenté ou vitré parce que la constitution donne à l’État le droit de changer la configuration géographique. Par exemple, l’État a reconfiguré le département de la Grand’Anse pour former un dixième département qui est le département des Nippes. De même, les localités de Tabarre et Cité Soleil qui appartenaient autrefois à la commune de Delmas, sont devenues deux communes distinctes avec leur propre conseil municipal. Actuellement, nous avons 10 départements, 40 arrondissements, 141 communes et 570 sections communales. Les arrondissements, les quartiers et habitations ne sont pas des collectivités territoriales.

Remarquons que toutes les collectivités territoriales ont toutes les mêmes problèmes d’aménagement du territoire ou d’application des réglementations locales. Cependant, les articles 66 à 88 de la constitution de 1987 prévoient un programme de décentralisation basé sur la déconcentration des institutions de l’Etat. Cela signifie que l’État central doit décentraliser les institutions de l’État pour permettre aux résidents des départements ou des communes de rester en contact avec le gouvernement où ils se trouvent. Ainsi, nul besoin pour un habitant des Cayes ou de Tiburon de se rendre à Port-au-Prince pour obtenir son passeport ou son permis de conduire ainsi que pour régler ses documents d’archives ou pour entrer à l’Université d’Etat d’Haïti. Le programme de décentralisation exige que les mêmes services publics qui existent dans la capitale existent aussi dans les collectivités les plus éloignées et les plus vulnérables du pays.

Prenons le décret de 2013, relatif au fonctionnement des collectivités territoriales qui a clairement détaillé le concept de la déconcentration. Ce décret explique les procédures nécessaires pour que les acteurs concernés assument correctement leurs rôles en étroite collaboration avec les bureaux locaux de la Direction Générale des Impôts (DGI) ou les Agences Locales d’Impôts (ALI). Dans une loi promulguée en 1990 pour renforcer les articles 85 et 86 de la constitution, le programme de décentralisation a ajouté des délégués départementaux au niveau départemental et des délégués vice-délégués au niveau des arrondissements. Dans cet arrangement, les sénateurs et les députés ne font pas partie du programme de ces acteurs actuels de la déconcentration ou de la configuration sociale.

Pour renforcer le programme de la décentralisation, les autorités du gouvernement central ont promulgué un texte en 1996 obligeant toutes les personnes travaillant dans les secteur public et privé à contribuer 1% de leur salaire dans un fonds spécial pour donner aux collectivités locales une impulsion économique dans leur action: Cette taxe porte le nom de Contribution au Fonds de Gestion et de Développement des Collectivités Territoriales (CFGDCT).

En ce qui concerne les CASECs, l’Etat central a envisagé un moyen de les aider à réussir dans leur travail de gestion et d’administration de la section communale. Par exemple, la loi les oblige à dresser cinq dossiers de base pour identifier les limites, la démographie, et les ressources humaines, naturelles et financières de la section communale. En dressant ces dossiers, les CASECs disposent des ressources adéquates pour se comporter en vrais agents de développement économique au lieu d’agents électoraux.

Les problèmes de financement des collectivités territoriales montrent clairement que l’Etat n’a jamais mis en œuvre ces lois. Sans outils de formation et de coaching, les élus locaux ne savent pas comment collecter les impôts sur les résidents, les entreprises et les autres activités qui se déroulent sur le territoire qu’ils gèrent. Par exemple, ils ne sont pas en mesure de collecter des fonds pour les maisons en construction dans l’espace communal (permis de construire), forcer les entreprises à payer pour des publicités sur les panneaux routiers, collecter des taxes sur les vendeurs qui remplissent les marchés, prélever des taxes sur les chauffeurs dans leurs stations de chargement. Sans ces revenus, les autorités locales n’ont pas les moyens d’assumer leurs responsabilités.

Eh bien, si ces lois existent, pourquoi les choses ne changent-elles pas?

La raison en est qu’aucune loi ne peut avoir les effets escomptés s’il n’y a pas d’autorité d’application ou s’il n’y a pas de formation pour éduquer les gens sur les mérites de la loi. Par exemple, la loi sur la déconcentration ne peut aboutir à rien de concret si les autorités locales n’ont pas de connaissances en matière fiscale pour initier une campagne de civisme ou de mobilisation fiscale en vue de collecter les impôts et les taxes et élaborer un budget pour la collectivité. Pour tenter de résoudre ces problèmes, le gouvernement central a publié un décret en 2015 visant à créer une institution qui offrirait une telle formation aux élus de la république. Mais malheureusement, cette institution reste encore une réalité sur le papier alors que les collectivités subissent une crise économique couplée à des crises gouvernementales où les gouvernements locaux ne reçoivent pas la formation nécessaire pour identifier les problèmes territoriaux et développer les plans d’actions pour les résoudre.

De toute évidence, ces problèmes continuent de s’aggraver car les victimes – résidents et citoyens – ne savent trop souvent comment faire valoir leurs droits en tant que tels. Un problème de manque d’éducation s’aggrave surtout quand on compare la façon dont les gens vivent totalement déconnectés de l’État. Par exemple, le sénateur représentant une commune de son département n’a pas de bureau local pour la personne à se plaindre, déposer son cahier de griefs. Dans un tel cas, c’est la presse qui les revendique par le biais de journalistes d’investigation conduits dans les zones pour ouvrir les yeux de l’Etat sur les problèmes auxquels les populations sont confrontés. Ainsi la presse devient la voix de ces victimes aux oreilles d’un État indifférent aux problèmes communautaires.

Bien que je n’encourage pas l’État à dicter ce que fait la presse, car une vraie démocratie aura besoin de la presse pour rester une institution objective, mais je peux même penser que le décret de 2013 aurait dû considérer la presse comme l’un des facteurs clés du programme de déconcentration. car la décentralisation n’aura pas lieu sans la médiatisation des conditions qui produisent des conséquences néfastes sur les localités. Dans un tel arrangement, les journalistes deviennent moralement obligés de négocier des questions concernant les citoyens tout en poursuivant une éducation civique. Par exemple, les vendeurs qui exigent la sécurité dans la rue doivent savoir que c’est par la perception de la taxe et de l’impôt que l’État génère des ressources pour embaucher davantage de policiers. Ainsi, alors que la presse réclame la sécurité des commerçants, elle doit faire reconnaître à ces mêmes commerçants leurs devoirs civiques: garder leurs rues propres et payer régulièrement leurs impôts. De même pour les propriétaires qui réclament de l’électricité et autre chose, la presse leur éduquera sur la nécessité de payer l’impôt locatif et leurs bordereaux d’électricité.

Alors que la presse joue son rôle d’agent social et les autorités locales reçoivent une formation qui les aidera à gérer les affaires locales depuis les collections d’impôt jusqu’à l’aménagement du territoire, les citoyens doivent également commencer à collaborer au plus bas niveau pour faire passer leurs revendications. Enfin, l’État central doit déléguer suffisamment d’opportunités aux autorités locales pour assumer et effectuer leurs fonctions. Par exemple, un bon pourcentage des bénéfices de l’État provenant de l’exploitation des ressources naturelles dans la zone X devrait aller au développement de la zone X où les autorités centrales, les autorités locales et les résidents ont le droit de ne pas s’entendre sur la manière dont ce fonds est décaissé ou alloué. Toutes ces dispositions doivent être prises dans une atmosphère de politique publique basée sur la transparence, la discipline fiscale et la gouvernance morale.

Dr. Bobb Rousseau
Gestion de Gouvernement Local
Droit et Politiques Publiques

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