À moins d’un mois de l’assassinat du président de facto Jovenel Moïse, l’épouse du président a décidé de donner la primeur de sa volonté de succéder à son mari au grand journal américain le New-York Times. La mort tragique et surprenante de Jovenel Moïse évoque plus de questions que de réponses. Plus d’uns se questionnent sur le mobile, le mode opératoire, l’absence de riposte et les éventuels bénéficiaires d’un crime aussi crapuleux. Malgré l’enquête mal menée par la police haïtienne suit son cours, l’absence de saisine de la justice haïtienne en bonne et due forme, le peuple haïtien a davantage à tirer de connaître ce qui s’est réellement passé. L’ambition présidentielle de Martine Moïse pose deux problèmes fondamentaux :
1.- Une ambition présidentielle suspicieuse et opaque
Étonnant pour certains et prévisible pour d’autres, la déclaration de candidature à la présidence de Martine Moïse met en lumière des zones jusqu’ici restées dans l’ombre! Pourquoi se déclarer candidate à la présidence à moins d’un mois à l’assassinat de son mari? Songe-t-elle à la présidence avant l’assassinat ? Auquel cas la mort de Jovenel Moïse la rend la première et la véritable bénéficiaire ! Pourquoi si le combat doit continuer serait-elle la candidate idéale pour se présenter lorsque l’on sait de notoriété publique, nombres de dossiers notamment l’affaire de corruption Dermalog et l’assassinat du bâtonnier Monferrier Dorval, impliqueraient directement l’intéressée ?
Poursuivant les déclarations de Martine Moïse, faisant des élucubrations et des supputations, elle a clairement orienté la vindicte sur : « des oligarques » qui auraient ourdi ou financé l’assassinat de son feu mari. Or, dans cette triste rocambolesque affaire, n’a-t-elle donc pas, elle et ses enfants le statut de témoins dans le cadre de ce dossier? Doit-on absolument croire à la version de Martine Moïse lorsqu’elle a ouvertement désigné des responsables de l’assassinat de son mari avant la fin de l’enquête ? Le choix de la communication politique à la place de la justice ne traduit-elle pas une manipulation à grande échelle ? Ce discours de facilité visant les oligarques est vicié car ne pouvant expliquer pourquoi les services de sécurité n’ont eu aucune réaction ce soir-là! La version de Martine Moïse sur l’assassinat de Jovenel est une version supplémentaire et ne peut être la version crédible d’un assassinat crapuleux qui fait d’elle l’héritière politique exclusive !
2.- Un héritage politique catastrophique brusquement adouci!
Le cynisme politique ne connaît pas de limites quand un pouvoir veut se renouveler coûte que coûte. L’on est forcé de revenir sur la gouvernance de Jovenel Moïse durant les années de sa présidence qui est en tout point de vue catastrophique pour la nation! Aucune institution ne fonctionne dans le pays! Exception faite pour la cour des comptes et du contentieux administratif (CSCCA), qui a somme toute résisté aux assauts répétés du prince! La république intérimaire allait connaître les affres les plus sanglantes de l’insécurité, de la barbarie et du délitement économique accéléré ! Cette gouvernance ouverte, arrogante et assumée de Jovenel Moïse, il la partageait avec sa femme Martine Moïse qui avait co-dirigé avec son feu mari la barque de l’exécutif! Que de candidats au poste de ministre ont été auditionnés par Madame avant de savoir s’ils auront la grâce de voir leur nom apparaître dans la version finale de l’arrêté de nomination du gouvernement dans le journal officiel le moniteur?
Le droit de voter et d’être élu est connu, reconnu et consacré par la constitution de 1987! Chaque haïtien majeur dispose de ce droit, Martine Moïse certainement aussi a le loisir de songer à briguer la présidence en succédant à son mari! Toutefois, elle devra accepter que l’on questionne rigoureusement son ambition présidentielle, que l’on doute légitimement de sa version des faits et qu’on rejette ses raccourcis visant à béatifier son époux autoritaire à discours facile et diaboliser certains oligarques hostiles tout en protégeant d’autres!
Enfin, elle devra répondre de la succession politique de son feu mari qui a eu pour mérite de tout démolir de l’État de droit dans ce pays qu’il a trouvé stable lors de son investiture, le 07 février 2017.