Élevée au rang de commune sous l’administration de l’ex-président Joseph Michel Martelly, l’ancienne première section communale des Verrettes (Bas-artibonite) Liancourt, comme toutes les communes du département fait face au problème du déboisement excessif des mornes et des plaines.
À défaut d’une alternative viable et durable, les paysans de Gadet, Marotte, Marou, et Sapoti, Marseille, Moreau-Drouet, Savann Tapyon, Ti mango…vivent à la merci du temps et grâce à la coupe illicite des bois et de la fabrication du charbon de bois. Ces oubliés de l’Etat « central » utilisent cette activité pour nourrir leur famille, payer l’encollage de leurs enfants, et autres.
Par conséquent, la commune de Liancourt est d’une rarissime pauvreté en arbre, ce qui représente une épée de Damoclès pour l’environnement et les personnes qui s’y trouvent. Le temps passe, la problématique est posée, mais le problème est très loin d’être résolu. À tel point l’on se pose des questions : la coupe illicite des bois préoccupe-t-elle l’Etat ? L’environnement est-elle une priorité ? En tout rien n’est moins sûr.
Pendant ces dernières années, la dégradation est visible dans la commune, les paysans s’autodétruisent à petit feu. Sans attention aucune des autorités locales, les paysans de la commune principalement ceux qui habitent en grande majorité dans les hauteurs, délaissés et dépourvus de toutes infrastructures, se jettent corps et âme dans la coupe des arbres et la fabrication du charbon de bois, ce qui représente pour eux, après une agriculture vivrière, la seule source de revenus, de subsistance.
Comme dans un champ de bataille où les victimes tombent minute après minute, les arbres, les arbustes tombent au quotidien et à toute heure à « Morou, Marotte, Gadet et Sapoti ».
Les sons des machettes et des haches retentissent de part et d’autre dans les mornes. La fumée des charbons est répandue un peu partout. Adolescent, adulte, jeune et vieux, ici, tout le monde est bûcheron et charbonnier en même temps.
«Marotte », zone montagneuse de la première section communale de Liancourt, l’un des piliers de la commune en matière forestière , boss Dieufaite, un ancien de la localité, assis sur un morceau de bois dans son « lakou » entouré de bois Mobin, avec sa pipe dégageant des bouffées de fumée, son sac et sa machette à sa droite, vient tout juste d’abattre un arbre, une première victime pour la journée .
«Conscient ou pas de la conséquence de la coupe excessive et anarchique des arbres ça ne changera rien, puisqu’ ici, l’État est absent, il n’y a ni factorie, ni usine, il n’y a rien du tout, la coupe des arbres est notre seule solution », a-t-il dit.
Boss Joe, un trentagénaire abonde dans le même sens, « depuis mon enfance je travaille avec mes parents dans ce secteur, qui est notre seul recours, notre source. Aujourd’hui, j’ai une famille à nourrir, à éduquer… je suis encore là, car il n’y a pas d’autres alternatives dans la zone a –t-il regretté.
Nous sommes tous conscients de la situation, du danger, mais que pouvons-nous faire ? » demande t- il. La déforestation représente un danger pour l’environnement, pour la localité, cependant, est-ce-qu’on peut accepter de mourir de faim sous prétexte de protéger l’environnement comme le veulent les autorités, ajoute-t-il ? Aujourd’hui, la dégradation est flagrante et ça ne fait que commencer a-t-il souligné.
Fils d’une marchande de charbon et d’un coupeur de bois, âgé de 30 ans, Alcès, cadet né d’une famille de 5 enfants, fustige le comportement de l’État central qui croyait pouvoir arrêter la coupe des arbres uniquement avec les spots publicitaires et les messages de sensibilisation.
Il fallait sensibiliser les habitants certes, mais et après questionne Alces. La situation est beaucoup plus complexe», poursuit-il d’un ton très fâché. Si l’État veut vraiment lutter contre le déboisement, il doit élaborer un plan d’aménagement d’abord, ensuite proposer une alternative sérieuse aux habitants, insiste-t-il
Il faut qu’il y ait une politique environnementale opérationnelle. Cela ne doit pas être dans les tiroirs a-t-il exigé.
Maître Marco Marcelin, citoyen avisé, avocat de formation place ses mots : tout le monde ici coupe les arbres comme bon leur semble, sans aucun contrôle. On les coupe soit pour faire du charbon, du jardin, des planches, etc. C’est la chasse aux arbres. Les choses vont de mal en pis. Quel sera l’état des mornes dans 10 ans ? La conscience suffira-t-elle pour arrêter ce fléau ? Non ! Seule une alternative sérieuse est capable de stopper ce fléau aux conséquences désastreuses pour la zone et pour le pays tout entier.
Sol dénudé, des arbres rabougris et répartis çà et là… des zones comme Marou, Marotte, Gadet et Sapoti sont sévèrement frappées par la coupe incontrôlée des bois. La situation est alarmante. Conscients de la situation, des conséquences qui pourraient en découler à court et à long terme, les habitants s’adonnent librement au déboisement qui s’est accéléré à vitesse exponentielle ces dernières années.
Les habitants ont la certitude que cette activité représente un danger pour leur vie, leur communauté, mais ils ne peuvent pas s’arrêter tant qu’il n’y aura pas une autre solution. La conscience ne suffit pas.