Depuis plusieurs années, Haïti traverse une période de turbulence où l’État semble défaillant face à l’ascension fulgurante des gangs armés. Ces groupes criminels, mieux organisés et plus violents que jamais, imposent leur loi dans de nombreux quartiers de la capitale, Port-au-Prince, et au-delà. Loin de se contenter de simples actes de banditisme, ces gangs ont réussi à prendre le contrôle des routes nationales, de zones entières, dictant leurs règles aux habitants. Kidnappings, extorsions, assassinats et affrontements violents font désormais partie du quotidien des citoyens.

L’absence de réaction claire et coordonnée de l’État, englué dans une crise politique et institutionnelle chronique, laisse ces gangs agir en toute impunité. Dans ce contexte chaotique, le pouvoir central, fragilisé par des luttes internes et des ressources limitées, semble incapable de rétablir l’ordre, abandonnant une population désespérée et vulnérable face à la montée en puissance de ces seigneurs de la guerre urbaine.

Selon le dernier rapport de l’ONU publié le 28 octobre 2024, près de 85 % des zones de la région métropolitaine sont désormais sous l’emprise des bandits. Entre le 11 et le 20 novembre 2024, l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) a recensé plus de 40 000 nouveaux déplacés, portant à plus de 700 000 le nombre total de personnes déplacées depuis le début de la crise.

Le pays est en train de perdre ses fils et ses filles, ses professionnels, ses « Madan Sara ». Après la région métropolitaine, Ganthier, une ville située sur la Route Nationale #8, près de la frontière Malpasse-Jimani, est venue s’ajouter à la liste des « territoires perdus ».

Depuis bientôt six mois, plus précisément le 21 juillet 2024 vers 3 heures du matin, les habitants de Ganthier se sont réveillés sous un concert de tirs d’armes automatiques des bandits de 400 Mawozo. Obligés de fuir leurs demeures, ils se sont réfugiés dans d’autres villes, notamment à Fond-Parisien.

Ne sachant à quel saint se vouer, et malgré les multiples appels à l’aide lancés aux autorités compétentes, les habitants de Ganthier sont livrés à eux-mêmes : sans vêtements, sans logement, sans aides étatiques. Ceux qui étaient jadis des propriétaires sont désormais des déplacés internes, cherchant une vie paisible, un droit fondamental garanti par la Constitution haïtienne.

Et comme si cela ne suffisait pas, depuis environ sept semaines, Fond-Parisien, une localité voisine de Ganthier et lieu d’accueil des nouveaux déplacés, subit des attaques et des menaces de toutes sortes de la part des bandes armées. Cette situation de panique a ralenti toutes les activités dans la zone, les bandits continuant à imposer leur loi.

Le désespoir envahit chaque coin de la ville. Les rumeurs, souvent exagérées, se propagent à une vitesse fulgurante, alimentant une panique générale. Des bruits de nouveaux affrontements, des menaces de raids ou d’attaques futures contre les civils se propagent rapidement, laissant la population dans une incertitude totale. La peur, palpable dans chaque regard, étouffe les cœurs et alourdit l’atmosphère. Les femmes, les enfants, les personnes âgées… tous vivent dans un état de tension extrême, incertains de ce que leur réserve le lendemain.

Face à la menace grandissante qui pèse sur Fond-Parisien et ses zones avoisinantes, il est impératif que l’État haïtien, à travers la Police Nationale et les Forces Armées, réagisse rapidement et avec fermeté. Des réponses concrètes doivent être apportées, et les autorités doivent assumer leur responsabilité face à l’agonie d’une population désormais à bout de souffle.

Les appels à l’aide ne peuvent plus rester sans réponse. Il en va de la survie de milliers de citoyens haïtiens qui, aujourd’hui, sont suspendus à un fil. Le temps n’est plus aux discours, mais à l’action. Le pays a besoin de leadership, de solidarité et de mesures immédiates pour protéger ses citoyens et restaurer la paix dans ces zones en péril.

Comité parole et action pour le développement de Fond-Parisien (COPADEF)
KOKORIKO Fanm Ayisyen
Solidarité Haitienne de défense des droits humains(SOHDDH)
Union des jeunes chrétiens de Fond-Parisien (UJECHREF)