J’analyse le discours du Conseiller Fritz Alphonse Jean lors de sa prestation de serment, et le constat est accablant : un discours creux, sans vision claire, sans actions concrètes. Il s’est contenté d’un cadre théorique déconnecté des réalités du pays, répétant les mêmes promesses vides que ses prédécesseurs. Une rhétorique usée, des engagements irréalisables et un alignement parfait sur la politique du statu quo. Pendant ce temps, la crise s’aggrave, et le peuple haïtien continue de souffrir.
Le pays s’enfonce dans une crise économique profonde, alimentée par l’instabilité sociopolitique, la corruption généralisée au sein de l’administration publique et la réduction drastique de l’aide internationale. Résultat : un déficit budgétaire abyssal. Mais que propose réellement le gouvernement pour y remédier ? Rien. Aucun plan de redressement, aucune réforme structurelle. Juste des mots vides, alors que l’économie du pays s’écroule sous le poids de l’inaction et de la mauvaise gestion.
L’annonce du recrutement de 3 000 nouveaux policiers et soldats des Forces armées d’Haïti n’est qu’un écran de fumée. Quelle formation recevront-ils ? Avec quels moyens seront-ils équipés dans un État en faillite ? Pire encore, l’intégration de l’ANAP dans la sécurité nationale est une grave dérive institutionnelle, une preuve supplémentaire de l’amateurisme du pouvoir. L’activation de l’ANI, autre sujet controversé, est également une décision opaque, alors que le budget du renseignement est détourné par une élite corrompue. Aucun sacrifice n’est consenti pour le pays, et l’État, gangrené par l’anarchie, est incapable de financer ne serait-ce que ses fonctions régaliennes.
Le ministère de l’Agriculture ne sert plus l’intérêt national, mais les ambitions d’un parti politique qui l’exploite à son profit. Résultat : l’agriculture est sacrifiée, la production locale est en chute libre, et le pays reste dépendant des importations. Comment prétendre relancer l’économie sans une politique agricole sérieuse ?
Le nombre de déplacés internes explose, passant de 600 000 à 1 million. Le flux migratoire s’intensifie, preuve de la détérioration rapide des conditions de vie. Face à cette catastrophe, que fait le gouvernement ? Il distribue des repas chauds comme si cela pouvait régler une crise structurelle. Aucune politique de logement, aucune prise en charge durable des déplacés, aucune réponse à la détresse des populations. Ce gouvernement préfère gérer la misère plutôt que la combattre.
L’annonce d’un référendum et du renouvellement du personnel politique est une farce. Dans un pays où l’insécurité règne en maître, où l’État est incapable d’assurer le minimum de stabilité, comment croire en la tenue d’un tel processus ? Le Conseil présidentiel de transition (CPT) et le gouvernement n’ont ni la volonté ni les moyens d’apporter le changement. Ils sont prisonniers d’un système qu’ils prétendent réformer mais qu’ils perpétuent en réalité.
Avec seulement sept mois de mandat, aucune transformation majeure ne pourra être réalisée. Ce gouvernement est déjà un échec avant même d’avoir commencé. Il est discrédité par le peuple haïtien, car il incarne tout ce que les Haïtiens rejettent : l’inaction, le détournement des fonds publics, l’absence totale de solutions concrètes et une soumission aux intérêts de la classe politique traditionnelle.
Fritz Alphonse Jean avait l’occasion de marquer une rupture. Il a préféré la continuité du néant. Son discours en est la preuve : une coquille vide, un exercice rhétorique sans substance, un symbole parfait du naufrage politique haïtien.
Edouard Poloche
Juriste & Historien
Polocheedouard90@gmail.com